bac français: Le personnage de Don Juan, Dom Juan de Molière et le libertinage
Don Juan est l'un des plus grands mythes de la littérature. Ce personnage incarne l'éternel séducteur au point de devenir une expression "c'est un véritable Don Juan". Don Juan est né sous la plume d'un espagnol, Tiso de Molina, en 1630 dans une pièce intitulée El Burlador de Sevilla. Le personnage de Don Juan est alors un libertin séducteur qui a connu une fortune exceptionnelle. Ce grand seigneur brave et libertin ne pense qu'à assouvir ses pulsions et pour y parvenir passe son temps à mentir. Toutefois, il croit en Dieu et à l'Enfer mais renonce sans arrêt à changer sa conduite. La punition divine s'abat sur lui et il finit foudroyé.
Chez Molière, le personnage devient un libertin révolté. Le plaisir de Dom Juan (avec un "m" cette fois-ci) n'est pas d'assouvir ses plaisirs mais de se délecter du spectacle de l'amour qu'il peut inspirer. Le personnage fuit durant toute la pièce. Tout d'abord, il fuit les frères d'Elvire qui le recherchent pour le tuer. Ensuite, il fuit son père. Enfin, il fuit ce qu'il est et renonce, lui aussi à répondre de ses actes. Dans la version de Molière, Dom Juan se dit athée, évoque à plusieurs reprises la non existence de Dieu. Refusant de se repentir, il finit brûlé dans les flammes divines. Le contenu de cette pièce lui valut d'être censurée, un mois après ses débuts (15 février 1665, date de création). Tout comme Tartuffe, la pièce de Dom Juan contraste avec les autres oeuvres de Molière.
Don Juan est un personnage complexe et insaisissable (autant au sens propre, qu'au sens figuré). Par ses agissements, il lance un défi à Dieu, à son autorité et remet en question son existence et sa légitimité. Don Juan est donc un contestataire de l'ordre établi. Dans Don Giovanni de Mozart, (1787) Don Juan déclare même préfèrer mourir que de renoncer à la liberté.
Don Juan est avant tout un libertin. Ce terme tient son origine du latin "libertinus" qui signifie "esclave affranchi", par opposition à "ingenuus" qui signifie "homme né libre". Le libertin a donc mené un combat et s'est révolté pour la liberté. Au 17ème siècle, le terme "libertin" caractérise un mouvement intellectuel qui conteste la vision traditionnelle du monde. S'appuyant sur l'épicurisme ( la mort n'est rien pour nous puisque quand nous sommes morts, nous ne pouvons ressentir la mort/ il faut profiter des plaisirs de la vie et ne se priver de rien tout en gardant la juste mesure), les libertins nient l'existence de Dieu. Pour eux, tout est matière et s'organise selon des lois que l'homme peut comprendre par sa raison. Parmi les libertins érudits on compte Cyrano de Bergerac (l'auteur et non le personnage d'Edmond Rostand au 19ème siècle), Théophile de Viau ou encore Saint-Amand. Le libertinage intellectuel s'accompagne, à la même époque, d'un libertinage moral qui s'oppose aux dogmes imposés par l'Eglise. Au 18ème siècle, le libertinage s'accompagne d'une vision hédoniste. Le plaisir est alors la quête ultime de la vie. On s'éloigne ainsi de la juste mesure prônée par les épicuriens. Les libertins du 18ème siècle sont dans l'excès et rejette toute autorité, surtout religieuse. Les auteurs libertins de cette époque sont Sade ou Choderlos de Laclos.
Résumé de la pièce de Dom Juan
Acte I
La pièce s'ouvre avec un éloge du tabac. Le spectateur pense qu'il s'agit alors de Dom juan qui est en scène. En réalité, il s'agit de son valet, Sganarelle. Il y aura d'autres moments dans la pièce ou le maître et le valet inverseront leur rôle. On découvre alors que Dom Juan fuit les frères d'Elvire, jeune fille qu'il a sorti du couvent pour l'épouser et qu'il a abandonnée lâchement. Avant même que Dom Juan n'entre en scène, Sganarelle nous le décrit comme "un grand seigneur méchant homme", "épouseur à toutes mains", "libertin", qui ne craint "ni Ciel, ni Loup-Garou".
Dom Juan apparaît alors et subit les remontrances de son valet. Il répond à ce dernier par une tirade sur l'amour, expliquant qu'aimer une femme avec fidélité, c'est être injuste car on ne pas répondre aux charmes des autres femmes. On apprend aussi que Dom Juan a tué un homme, un Commandeur, mais qu'il ne redoute pas la moindre conséquence. De toute façon, Dom Juan est déjà occupé à "une nouvelle entreprise amoureuse": enlever une jeune fille durant une promenade en bateau.
Elvire vient demander des comptes à Dom Juan qui refuse, dans un premier temps, de lui parler. Au lieu d'assumer ses actes, Dom Juan invente alors un mensonge. Il dit à Elvire qu'il a renoncé à elle car il avait peur que Dieu se retourne contre lui, étant donné qu'Elvire était au couvent auparavant. En réalité, Dom Juan ne craint pas Dieu et Elvire le sait bien. Elle invoque donc que s'abatte la justice de Dieu sur Dom Juan. Celui-ci reste indifférent.
Acte II
Pierrot, un paysan, raconte à Charlotte, sa fiancée, comment il a sauvé deux hommes de la noyade. Ces deux hommes sont Sganarelle et Dom Juan, qui ont échoué dans leur "entreprise amoureuse" et qui sont en train de se rhabiller. Dom Juan courtise alors Mathurine lorsque Charlotte arrive. Il s'amuse alors à séduire les deux jeunes filles pour se délecter du spectacle de la jalousie et les voir se déchirer pour lui.
Alors que les deux jeunes filles sont en pleine dispute, Dom Juan apprend qu'il est suivi par douze hommes armés. Il s'enfuit, déguisé en habit de campagne et Sganarelle en robe de médecin.
Acte III
Sur la route, Sganarelle interroge son Maître sur ses croyances et ses moeurs. Sganarelle voudrait convaincre Dom Juan du fait qu'il suit le mauvais chemin. Dom Juan répond que la seule chose en laquelle il croit c'est que "deux et deux font quatre et quatre et quatre font huit". Dom Juan critique la médecine " la plus grande erreur qui soit parmi les hommes" et reste évasif concernant la religion.
Lorsque Dom Juan croise un mendiant qui lui promet de prier Dieu en l'échange d'une pièce. Dom Juan demande alors au pauvre de jurer en l'échange d'un Louis d'or. Le pauvre refuse de céder. Dom Juan finit par lui donner la pièce "par amour de l'humanité". On sent alors le cynisme de Dom Juan.
Dom Juan porte alors secours à un jeune homme attaqué par trois voleurs. Le jeune homme est Dom Carlos, un des frères d'Elvire mais il n'a jamais vu Dom Juan.
Lorsque Dom Alonse arrive, il reconnaît Dom Juan et demande à son frère qu'ils mettent en oeuvre leur vengeance. Dom Carlos dit qu'il ne peut se venger d'un homme qui lui a sauvé la vie. Dom Alonse dit que la vengeance n'admet aucun compromis. Finalement, Dom Juan pourra avoir la vie sauve.
Dom Juan arrive devant le tombeau du Commandeur qu'il a tué. Pour rire, Dom Juan demande à Sganarelle qu'il invite la statue du Commandeur à diner. La statue se met à bouger. Incrédule, Dom Juan renouvelle la demande en personne et la statue bouge à nouveau.
Acte IV
Dom Juan repense à la statue du Commandeur et dit qu'il a été trompé par ses sens. Sganarelle pense que c'est le Ciel qui veut se venger et que Dom Juan ferait mieux de se repentir au plus vite.
Monsieur Dimanche, créancier de Dom Juan, vient réclamer son dû. Dom Juan arrive à s'en débarasser par de belles paroles.
Dom Louis, le père de Dom Juan, entre en scène. Il vient sermonner son fils et lui rappelle que la noblesse est avant tout générosité et vertu. Dom Juan répond avec ironie et méprise son père. Dom Louis quitte la scène en invoquant la vengeance divine.
Dom Juan passe à table lorsque la statue du Commandeur frappe à la porte. Dom Juan l'invite à s'asseoir. La statue du Commandeur demande à Dom Juan d'en faire de même et répond "en aurez-vous le courage?". Dom Juan accepte.
Acte V
Dom Juan fait mine de se repentir et tient un discours hypocrite à son père, lui jurant d'être un bon fils. Il tient le même discours à Sganarelle à qui il explique qu'il va devenir un faux-dévot (comme Tartuffe) pour être protégé de toutes ses actions. Sganarelle met en garde Dom Juan de la damnation.
Dom Carlos, qui a épargné la vie de Dom Juan, demande à ce dernier qu'il joue le rôle d'époux dévoué auprès de sa soeur Elvire. Dom Juan prétexte qu'il ne le peut en raison de sa vocation religieuse subite. Dom Carlos ne le croit pas et en appelle à la vengeance divine.
Pour Sganarelle s'en est trop "le Ciel qui vous a souffert, jusques ici, ne pourra souffrir du tout de cette dernière horreur". Dom Juan répond ironiquement que le Ciel n'a qu'à s'exprimer plus clairement.
Un spectre, déguisé en femme, surgit alors et donne à Dom Juan une chance de se repentir mais en vain.
La statue du Commandeur vient chercher Dom Juan et ce dernier brûle dans un feu invisible. Alors que tous semblent se réjouir de la mort de Dom Juan, Sganarelle est malheureux car il n'aura jamais ses gages.